
Hors-Saison
Escapades loin du tumulte du monde...
Te Ika-a-Maui, l'île du nord
Semaine 1 : Auckland
Nous sommes arrivés à Auckland ce mercredi 28 octobre après 8h de vol depuis Bali (avec une escale à Sydney). Les queues pour sortir de l'aéroport ont été interminables. Nous sommes arrivés en même temps qu'au moins cinq avions et le temps pour atteindre les agents de l'immigration n'en finit plus de se rallonger. Tout ça pour deux questions de routine et un tampon sur le passeport... Au moins nos valises nous attendent déjà sur le tapis roulant ! Mais ce n'est pas terminé, car vient ensuite la fameuse épreuve de la biosecurity tant redoutée ! L'attente recommence avec sans cesse cette question en tête « sommes nous sûrs de ne pas avoir oublié un fruit ou un bout de gâteau dans nos valises ? ». La douanière nous interroge : « vous confirmez ne rien avoir emporté d'organique ? Des fruits frais ? Vous êtes sûrs ? Sûrs sûrs ? » « Euh.. oui oui madame... ». Passage obligatoire au scan des valoches, le chien est déjà occupé à renifler ailleurs. Nous passons sans problème tandis qu'une malheureuse chinoise voit toutes ces douceurs du pays s'envoler sous ses yeux sans sembler comprendre ce qu'il se passe...
Enfin dehors après une heure de formalités douanières. Notre hôte, Peter, nous reconnaît aussitôt à l'aéroport (il paraît que nous avons de bonnes tronches de franchouillards...) et nous sommes partis pour sa maison, dans la banlieue chic de Remuera, en bordure du centre-ville d'Auckland. Peter semble sympathique et rigolard, mais son accent est à couper au couteau. Nous étions prévenus qu'il faudrait nous habituer à l'accent kiwi mais les débuts sont tout de même un peu fastidieux ! Il nous présente la maison et file retourner au travail. De notre côté, après une rapide installation, nous allons nous coucher sans demander notre reste.
Durant la semaine qui a suivit nous avons tranquillement profité de notre long séjour sur place pour visiter tranquillement les environs et faire toutes les formalités indispensables au bon déroulement de notre année sur place.
Nous découvrons peu à peu la ville de balade en balade. La côte, et notamment le célèbre Viaduct Basin connu pour son animation et ses bars nous déçoit beaucoup. Auckland est un énorme port marchand et la cité des voiles a finalement un front de mer extrêmement industriel... Les rues sont d'immenses boulevards bondés, bordés de part et d'autres de multitudes de magasins. Ce n'est pas trop pour nous.
Ce qui nous enchante le plus dans Auckland ce sont en fait les nombreux points de vue sur la ville depuis ses nombreux volcans. La vue depuis le Mont Eden est magnifique. Nous dominons le centre-ville et les buildings en deviennent beaux. Nous nous rendons ainsi bien compte qu'Auckland s'est construite sur un bout de terre qui n'est pas bien large : de tous côtés, la mer fait partie du paysage. Le volcan est de plus très bien conservé et le cratère est impressionnant. Celui-ci, sacré, est protégé. Il est donc interdit de pénétrer à l'intérieur.
Nous avons la chance d'être sur place lorsque les All Blacks, l'équipe de rugby nationale, gagne la coupe du Monde de Rugby qui se déroule en Angleterre. Le pays est à l'euphorie (douce ici, les néo-zélandais ne sont pas très exubérants : ils sont heureux mais ce n'est pas la folie dans les rues, même nos manifestations contre de mauvaises réformes débordent plus de fête et de bonne humeur -et de casse- !). Nous sommes près de 50 000 à les accueillir au Victoria Park (nous nous rendons évidemment au rendez-vous) mais l'ambiance, très familiale, est semblable à un très gros brunch. Tout le monde est très content et fier de voir arriver les joueurs, trophée en main, et ils sont accueillis avec chaleur.
Côté formalités, tout commence plutôt bien. Notre hôte a l'habitude de voir passer des pvtistes (détenteur de visas vacances-travail) et il connaît une banquière qui ne nous fera pas d'histoire pour nous ouvrir un compte sans justificatif de domicile, démarche indispensable pour obtenir l'IRD, le numéro sésame pour pouvoir travailler (et payer des impôts, of course). Il nous obtient un rendez-vous pour le samedi midi et en environ 15 minutes l'affaire est bouclée. Il faut dire que Myra, notre banquière, est efficace et gentille comme tout.
Le dimanche nous nous rendons au Car-fair de Remuera, un gros rendez vous hebdomadaire de vendeurs (pros et particuliers) de voitures d'occasion. Il y a énormément de vans, les backpackers qui font le tour du pays en road-trip sont nombreux ici. Nous faisons le tour en hésitant encore. Le van est une alternative intéressante économiquement : il nous faut un véhicule et cela permet de dormir dans les nombreux campings avec un certain confort ; mais Loïc ne veut pas vivre un an en étant courbé et en vivant dans un lit. Nous tombons d'accord sur un van de grande taille. Il n'est pas équipé (il faut tout construire pour en faire un van « habitable » mais cela ne nous dérange pas) mais il a moins de 200 000 km ce qui est dur à trouver et coûte moins de NZ$ 3500. Après un tour nous nous mettons d'accord avec le vendeur, nous lui faisons un acompte de NZ$ 100 et il s'engage à réparer les essuies-glaces déficients avant de nous vendre le véhicule.
Après quelques jours à essayer de retirer de l'argent nous nous rendons compte que l'affaire n'est pas si simple, les plafonds de retrait sont très limités à l'étranger et nos banques sont très lentes à effectuer des virements sur nos comptes néozélandais. Nous pensions avoir notre véhicule tout de suite et pouvoir l'aménager tranquillement tant que nous étions à Auckland, cela sera finalement un peu plus compliqué que prévu.

Nous visitons la Auckland Art Gallery qui se trouve dans l'Albert Park. Nous trouvons certaines collections intéressantes mais surtout le bâtiment superbe et parfaitement en adéquation avec son environnement.


Semaine 2 : Préparer le départ
Les jours passent et il nous semble de plus en plus compliqué de récupérer nos économies à temps. Nos plafonds de retrait ne se débloquent pas et les virements vers notre compte tout neuf mettent un temps fou. Mais ils arrivent enfin et nous contactons alors le vendeur de la voiture. Surprise ! Celui-ci nous dit alors que tandis qu'il réparait les essuies-glaces une énorme fuite a déversé de l'huile partout dans la voiture. Évidemment nous décidons de laisser tomber l'achat et nous fixons un rendez-vous pour qu'il nous rembourse l’acompte. Retour à la case départ donc. Il nous faut trouver un van, et rapidement, car nous ne restons plus que deux jours chez Peter ! Nous nous rendons au Car fair de Upper Queen Street mais celui-ci est très décevant et hors de prix, nous nous rendons donc le dimanche à celui de Remuera où nous savons que le choix est immense. Nous faisons de nombreux tours sans parvenir à nous décider. Il est alors temps pour nous de nous rendre compte que nous ne retrouverons pas la même affaire que la semaine précédente : un van aussi grand et à si bon prix. Nous nous rabattons sur un van plus petit mais en parfait état de marche et avec un kilométrage raisonnable pour $3300. Le vendeur vietnamien est un homme sympathique et honnête qui vend le véhicule de fonction qui le suit depuis un moment. Ici on achète une voiture comme on achète un kiwi : on conclu le prix, une tape dans la main et l'affaire est réglée : nous filons retirer l'argent nécessaire (et ça marche!) et nous nous rendons dans une petite tente dans le Car fair pour effectuer le changement de nom. A peine arrive-t-on à notre tour que l'on nous signale un bug du réseau : tout le système est naze, impossible de procéder à la vente ! Avec notre vendeur vietnamien nous ne nous décourageons pas et sautons dans le van pour filer au Postshop le plus proche où il suffit de remplir un simple bout de papier pour finaliser la transaction. Enfin ! Nous avons notre van ! Et moins de deux jours pour l'équiper car dès demain nous quittons notre hôte... Heureusement une bonne partie des magasins est ouverte le dimanche et nous n'avons pas trop de mal à trouver les matériaux nécessaires à la construction de notre combi-van.
Nous quittons enfin Auckland le lundi en fin d'après-midi. Toutes nos découpes de bois sont faites mais nous n'avons pas eu le temps de monter nos meubles. Qu'à cela ne tienne, nous dormirons la première nuit sur un tas de planches ! Direction donc le nord, dans un camping situé juste au-dessus de la petite ville de Waipu, célèbre pour ses grottes. Dès que nous sortons d'Auckland le paysage change radicalement, devenant ainsi montagneux et sauvage. C'est pour nous une libération, nous étions très pressés de quitter la ville et de commencer vraiment notre aventure.
Première surprise sur la route, un péage (dit Toll) indiqué régulièrement mais qui est uniquement sous forme de caméras qui enregistrent la plaque pour un paiement différé (jusqu'à 5jours) sur internet. Nous ne le comprenons que trop tard et sommes bons pour devoir partir en quête de wifi dès le lendemain...
Le camping de Uretiti est géré par le Doc, le Département de la Conservation, sorte d'Office des forêts local. Le cadre est plutôt enchanteur : situé en bord de mer, le camping n'est pas divisé en allées et emplacements mais est un grand terrain un peu vallonné et arboré. C'est une sorte de petit paradis ; ici même les oiseaux ont de petits abreuvoirs près des robinets et un message invite à les remplir régulièrement.

Nous parvenons malgré tout, durant la semaine, à nous balader un peu. Notamment autour de Orakei Basin ou de One Tree Hill situé dans le Cornwall Park. Ce volcan (qui contrairement à ce que son nom laisse penser, comporte plus d'un arbre) est un véritable havre de paix dominant la ville. Sa particularité est de se trouver dans un grand parc où humains et moutons évoluent de concert. C'est un véritable plaisir de grimper sur les flancs de ce volcan en pleine ville comme on grimperait dans des pâturages en montagne.

Semaine 3 : Bream Bay
Le lendemain nous filons à Whangarei, la grosse ville du coin (à une trentaine de kilomètres) pour de derniers achats indispensables et un passage obligé sur internet. Un coup de fil de notre banquière préférée et en quelques minutes notre van est assuré. Nous passons le reste de l'après-midi à bricoler dans un cadre verdoyant, pour le plaisir amusé des autres résidents du camping. L'un d'eux nous invite d'ailleurs à venir boire le thé dans son camping-car, avec sa femme, à la nuit tombante : c'est ainsi que nous rencontrons Brian et Joanna, un charmant couple de septuagénaires. L’accueil est très anglais : le thé est servi avec scones et autres petits gâteaux. Nous nous entendons très bien, et ce petit thé du soir deviendra une tradition jusqu'à leur départ, cinq jours plus tard. Brian est un ostéopathe refusant d'arrêter de pratiquer ; Joanna, quant à elle, avait pour métier de s'occuper de leurs cinq enfants (ayant fait d'eux les heureux grands-parents de pas moins de 28 petits-enfants!). Se sont des habitués du camping, amoureux de leur pays, et ils nous livrent une multitude d'endroits à visiter absolument. Avant de quitter le camping, ils nous invitent officiellement à venir passer les fêtes de Noël avec eux, et toute leur famille, au sud d'Auckland.
Le lieu, coincé dans les dunes, est très beau et serein. Nous découvrons, dans le bras de mer qui subsiste, une constellation d'étoiles de mer et une multitude de bernard-l’hermite, petits crabes et autres crustacés. Après avoir pu observer tout ce petit monde, nous rentrons pour notre dernière nuit au camping d'Uretiti Beach.
Nous partons dès le lendemain matin en direction de Waipu Caves où nous arrivons sous une pluie battante. Les grottes sont situées dans une très jolie forêt. La visite se fait librement et heureusement nous avons nos torches pour pouvoir vraiment visiter les salles. Mais la véritable magie se produit lorsque nous les éteignons et que des centaines de vers luisants se mettent à scintiller dans le noir. Leur lumière verte se reflète comme autant d'étoiles sur la rivière souterraine. Émerveillés, nous quittons à regret les grottes pour rejoindre Whangarei pour en apprendre un peu plus sur les terribles attaques qui ont touché Paris deux jours plus tôt. Les nouvelles sont dures et nous nous sentons bien loin des nôtres. Mais nous ne pouvons pas trop nous attarder, et, soulagés de pas avoir entendu de mauvaise nouvelle de la part de nos proches, nous partons en direction du nord et ses forêts de Kauris.


Nous profitons de notre dernier après-midi sur place, alors que notre van commence à prendre forme et devenir vivable, pour visiter enfin les environs. Nous nous rendons aux Waipu Water Falls, d'agréables chutes d'eau dissimulées dans un écrin de verdure, puis à Waipu Cove, dont la plage est parait-il magnifique (mais elle nous semble tout de même moins jolie que Uretiti Beach).


Nous remontons enfin jusqu'à une sorte d'isthme sur lequel se trouve une réserve pour les oiseaux marins : le Wildlife Refuge. Nous arrivons à marée basse, moment idéal pour observer les Variable Oystecatchers (d'amusants oiseaux au plumage noir et long bec orange, passant leur temps à retourner le sable pour trouver de quoi manger, tout en faisant bien attention à ne pas se faire rattraper par les vagues. Il ne reste plus que 4000 individus de cette espèce endémique de Nouvelle-Zélande) qui cherchent leur dîner et commencent à s'installer pour dormir, et les White-faced herons.
Semaine 4 : Des forêts de la Côte Nord aux dunes du Far North
Les Kauris sont des arbres gigantesques dont certains sont multi-millénaires. Ceux-ci ayant été largement exploités au XVIIIe et XIXe siècles, ils sont désormais très protégés, d'une façon parfois quelque peu discutable. Nous nous arrêtons au camping de Puketi Forest, camping très basique où, comme dans la plupart des autres campings, le paiement se fait grâce à de petites enveloppes à glisser dans une urne. Toujours sans nouvelles de nos numéros IRD (numéros indispensables pour pouvoir travailler), nous décidons d'aller explorer la Waipoua Forest, une immense et ancestrale forêt en redescendant vers le Trounson Park par la côte ouest, plutôt que de nous diriger vers la très touristique Bay of Islands, à l'est, où nous devrions trouver assez facilement du travail. Nous en profitons pour visiter la petite ville historique de Rawene. La bourgade est tranquille mais nous ne trouvons pas particulièrement de raisons pour y rester très longtemps. Nous passons également par Omapere où le panorama depuis le South Head Viewpoint est surprenant. Deux langues de terre se font face dans la mer ; l'une est verte et luxuriante, et l'autre est une immense dune de sable jaune. Nous passons un moment à admirer le panorama. En continuant plusieurs kilomètres vers le sud, nous arrivons enfin dans la Waipoua Forest où nous sommes accueillis par le célèbre Tane Mahuta, un kauri de 1200 ans, haut de 51 mètres et dont le périmètre est de 14 mètres. Sa taille impose le respect et nous fait nous sentir bien petits. Nous continuons alors notre route dans une forêt où ces immenses kauris sont de plus en plus nombreux.
Nous nous installons dans le camping du parc, dans lequel une petite barrière nous fait entrer dans une forêt enchanteresse. Attention à montrer patte blanche cependant ; avant de pouvoir poser les pieds sur les sentiers parfaitement damés et les passerelles, il est obligatoire de brosser ses chaussures et d'asperger ses semelles d'un produit chimique désinfectant... La forêt étant également une réserve de kiwis, des panneaux nous préviennent que du poison a été répandu pour exterminer les prédateurs de cet oiseau ratite endémique du pays. Nous décidons de partir à la chasse aux kiwis le soir même car celui-ci, non content d'être d'un caractère discret, est en plus nocturne. Munis de nos lampes à lumière rouge (qui permettra d'observer les kiwis sans les déranger), nous arpentons la forêt, plongée dans un tel silence que nous doutons de la réussite de notre entreprise. À juste titre car nous repartons bredouilles. Qu'à cela ne tienne, nous avons bien repéré les lieux et avons convenu d'un plan de bataille pour la prochaine fois !
Le lendemain nous reprenons la route en direction de l’extrême nord du pays. Nous empruntons des routes gravillonnées coupant à travers la forêt pour atteindre Rarawa Beach, une magnifique petite crique de sable blanc et d'eau cristalline perdue dans un écrin de verdure. Nous nous installons face à une rivière côtière où s'ébattent des oies bruyantes. Dans le pré de l'autre côté, de jeunes taureaux hurlent leur solitude amoureuse. Nous décidons de rester ici deux nuits, le temps de faire une balade sur la plage, de tenter une première baignade (fraîche) dans le Pacifique et de fignoler un peu notre van. Nous continuons ensuite notre avancée dans les terres du nord. Nous nous arrêtons par hasard sur le parking de la réserve Te Paki car un panneau routier indique la présence de dunes géantes à 3 km. Nous avons du mal à l'imaginer car nous sommes entourés de forêts.
Le lendemain, nous profitons du beau temps pour nous lancer sur une petite portion (3h aller) de la randonnée du Cape Reinga, entre le camping et le camp de base de Pandora. Le chemin sillonne dans les dunes mais, après une bonne heure de marche, nous commençons a éprouver une certaine lassitude. Bien que très joli, le paysage reste assez monotone (une pinède assez courte sur patte) et isolé de la plage. Nous décidons donc de faire demi-tour. De retour au camping, nous partons goûter le Pacifique qui nous tend les bras, avant de nous remettre à de passionnants travaux de couture pour parachever l'habillage de notre van.
Le lendemain, mardi 24 novembre, nous reprenons la route en direction de la Bay of Islands au sud. Un petit passage éclair sur la Ninety Mile Beach, une immense plage de 90 km de long, qui n'offre pas grand intérêt à nos yeux. Nous nous arrêtons également à Kaitaia afin de faire changer notre roue de secours. Nous visitons au moins cinq garages qui nous répondent tous la même chose : « c'est une drôle de taille pour un pneu ! ». Changer cette roue sera donc vraisemblablement plus compliqué que ce que nous pensions. Nous continuons notre route, et la nuit approchant alors que nous sommes encore loin de notre destination, nous décidons de faire étape dans la forêt de Puketi et son charmant camping. Sur la route sinueuse, un petit chemin descendant vers une rivière attire notre attention. Nous décidons d'aller jeter un coup d’œil pour voir s'il est possible d'y passer la nuit. Nous roulons donc jusqu'à la berge et il s'avère qu'en dehors de ce petit chemin qui descend et d'un petit espace pour faire demi-tour, l'endroit ne se prête pas vraiment à l'installation d'un camp. Nous décidons donc de faire demi-tour, et, alors que nous sommes dans le sens pour remonter la côte, notre pneu arrière droit s'enfonce brusquement dans la berge meuble. Une tentative pour prendre un peu d'élan et ressortir nous amène directement dans le lit de la rivière, heureusement très peu profonde à cette période de l'année ! Nous passons une bonne heure et demie à essayer de nous dépêtrer de cette rivière. Cailloux, bouts de bois, cric... rien ne vient à bout de cette berge instable. Épuisés, trempés et d'autant plus embourbés, nous décidons d'abandonner le van sur place et d'aller chercher de l'aide sur la route (où, soit dit en passant, nous n'avons vu passer personne depuis que nous sommes arrivés...). Après 20 minutes de marche dans la forêt, nous apercevons enfin un signe miraculeux de civilisation : une boite aux lettres au bord de la route... Nous nous engageons dans un petit chemin et apercevons au bout, une petite maison dont une pièce, à l'étage, est éclairée. Nous sommes accueillis par deux chiens qui nous inspectent d'un air professionnel avant de prévenir les habitants de la maison de notre arrivée. Après quelques appels, une fenêtre s'ouvre et nous voyons apparaître la tête d'un jeune homme surpris de nous voir là. Après que nous lui ayons raconté notre mésaventure, il s'empresse de répondre favorablement à notre demande d'aide. Nous nous entassons à l'avant de son 4x4 et partons retrouver notre cher van. Après une bonne demie-heure à creuser, tracter, pousser... nous voilà de retour sur une terre plus ferme. Nous faisons nos adieux à ce sympathique Jules et nous nous rendons enfin au camping où nous nous endormons sans tarder.


Quelle n'est donc pas notre surprise de tomber au détour du chemin sur des dunes absolument gigantesques ! D'immenses langues de sable semblent couler dans la forêt, péniblement arrêtées par un mince ruisseau au fond rouge. Nous entreprenons l'ascension : les dunes s'étendent à perte de vue et nous donnent l'impression de nous retrouver au beau milieu du Sahara. De jeunes gens s'amusent à s'élancer en bodyboard du haut des dunes ; c'est parait-il une activité phare dans la région. L'effet est un peu décevant : la vitesse est étrangement lente et le bas de la dune n'est atteinte que par la planche, obligeant les surfeurs à finir à pied pour remonter ensuite dans le sable.

Dépaysés par cette escale africaine nous continuons notre route et atteignons enfin le Cape Reinga, à l'extrême nord du pays, lieu de rencontre entre la mer de Tasman et le Pacifique. Ce phénomène est parait-il extraordinaire car cette confrontation crée une limite tumultueuse au milieu des eaux. Le lieu est sacré pour les maoris puisque c'est d'ici que partent les esprits pour rejoindre la terre de leurs ancêtres. Pas de chance pour nous, la mer est particulièrement clémente, et la confrontation se fait sans heurt, créant tout juste un petit clapotis. Le lieu est très beau mais nous ne pouvons pas nous empêcher de ressentir une petite déception !


Nous partons installer notre camp-van non loin de là, à Tapotupopu, en bordure d'une rivière côtière poissonneuse. Nous sommes là pour deux jours, un peu tronqués en raison de gros passages pluvieux. Nous faisons malgré tout quelques petites balades dans les alentours et tentons de faire connaissance avec le poisson local : une bestiole qui fait des bonds impressionnants. Mais munis d'une simple ficelle et d'un hameçon pas adapté, celui-ci nous nargue sans jamais mordre.
Nous partons ensuite en direction de Spirit Bay, un peu plus à l'est pour y passer également deux nuits. Situé au bout d'une route gravillonnée de 16 km, le lieu est difficile à atteindre ; nous valant même une petite sortie de route impressionnante mais sans gravité. C'est un havre de paix situé en bord de mer et entouré de magnifiques montagnes verdoyantes où court une multitude de chevaux. Que dire de la petite rivière qui passe au milieu pour compléter ce tableau bucolique ?!
Tandis que nous partons visiter un village maori non loin, nous découvrons que la roue avant droite est crevée et dégonfle à vue d’œil. Nous arrivons donc au ralenti, et à plat, sur le parvis de l'église, nous laissant ainsi le temps d'admirer le paysage ! La roue est changée assez rapidement et la visite ne prend également pas très longtemps.

Semaine 5 : En quête de travail
Le lendemain, nous arrivons enfin à rejoindre notre objectif : la ville de Kerikeri, réputée pour ses vignobles et ses vergers, où nous espérons bien trouver du travail. Nous faisons un rapide tour de la ville et commençons à prospecter. Malheureusement, nous arrivons juste en fin de saison, et il faut attendre les fêtes de fin d'année pour entamer les récoltes de l'été. Nous devrons donc revoir nos plans !
Nous décidons d'aller voir les Rainbow Falls qui se trouvent dans la ville elle-même. En arrivant au parking, nous tombons, avec plaisir, sur Jules qui nous avait reconnu depuis son lieu de travail. Il nous explique que, la veille au soir, sa compagne Anouk lui avait demandé s'il avait pensé à nous proposer de garder leur maison et leurs chiens durant leurs vacances de fin d'année (ce procédé se fait beaucoup ici). Il était donc ravi d'avoir l'occasion de nous le proposer. Nous échangeons nos numéros de téléphone pour nous donner le temps de la réflexion et nous séparons. Nous partons donc visiter les chutes qui sont très belles et semblent être perdues en pleine forêt alors que nous ne sommes qu'à quelques centaines de mètres du centre-ville.
Une bière en terrasse plus tard, nous nous trouvons un endroit calme près d'un parc pour passer la nuit. Les oiseaux y sont légions. Plusieurs couples de Perroquets Rosella, entre autres, y ont élu domicile. C'est l'endroit parfait pour passer la soirée.
Le lendemain matin, nous appelons Jules pour lui dire que nous sommes intéressés par sa proposition ; il en est ravi. Nous devons convenir d'un jour pour une invitation à dîner et il promet de nous rappeler après en avoir discuté avec Anouk. Nous passons notre journée à profiter de la ville pour aller sur internet (pour trouver du travail) et d'autres tâches essentielles. Une douche par exemple, est indispensable. Nous nous rendons donc à la piscine publique de la ville qui s'avère être au beau milieu du collège-lycée. Il s'agit de la piscine de l'établissement, en plein air et ouverte au public en dehors des périodes de cours. Pour 3$ chacun nous en profitons pour faire quelques brasses et prendre une délicieuse douche chaude.
L'après-midi nous décidons de visiter Paihia, le cœur touristique de la Bay of Islands. Sur la route, nous faisons un petit arrêt aux Haruru Falls, chutes d'eau de faible hauteur mais assez agréables. Non loin de là, en arrivant sur la côte se trouve le célèbre site du Waitangi Treaty Grounds, lieu historique fondateur de la Nouvelle-Zélande où fut signé le très controversé Traité de Waitangi, le 6 février 1840, entre les britanniques et les maoris. Celui-ci instaure la fin de la guerre, la protection des maoris mais également l'annexion officielle du pays par la Grande-Bretagne ; il ne sera cependant jamais ratifié par les anglais. Le lieu est maintenant symbolisé par un drapeau, un musée et des pirogues de fête. L'entrée nous semble beaucoup trop chère par rapport à ce qui semble être une attraction touristique montée de toutes pièces dans un lieu historique n'ayant en fait laissé aucune trace. Nous passons donc notre chemin.
Arrivés à Paihia, le temps est malheureusement très gris. Cette petite station balnéaire est effectivement très touristique, nous ne trouvons dans la ville qu'une succession de restaurants et d'hôtels. Le lieu n'est pas complètement déplaisant mais il manque de charme et d'authenticité. C'est cependant l'occasion pour nous de goûter, le soir venu, aux fameuses moules ourlées de vert (green-lipped mussels) de Coromandel : énormes et savoureuses.
Nous nous garons dans une petite rue pour passer la nuit.
Le lendemain, nous décidons de nous rendre à Russell. Quand nous arrivons au ferry et que nous constatons que la traversée de 5 min coûte 12,50$ nous décidons de remonter directement à Kerikeri et de repasser par là quand nous redescendrons vraiment vers le sud et que nous n'aurons donc pas à reprendre le ferry au retour.
Nous nous rendons donc à notre rendez-vous chez Jules et Anouk. Nous avons le plaisir de découvrir que la famille est allée pêcher en mer durant la journée et que poissons frais et coquilles saint-jacques sont ainsi au menu. Nous faisons le tour de la maison et connaissance avec les deux chiennes d'un certain âge dont nous aurons la garde. On nous invite à installer le van dans le jardin et nous passons donc ainsi notre première nuit dans notre futur logement temporaire.
Dès le lendemain, nous décidons de commencer à redescendre vers le sud d'Auckland. Nous passons donc par Russell, charmante petite bourgade isolée. Malheureusement le temps n'est pas de la partie. Nous continuons vers le sud par la route. Celle-ci, située entre mer et vallons verdoyants, est magnifique.
Nous faisons un arrêt aux Whangarei Falls, que nous avions ratées en montant. Celles-ci, hautes de 26m, sont très belles et une balade en boucle prometteuse y débouche.
Un petit passage sur internet nous informe que les deux jobs de cueillette dans la Bay of Plenty auxquels nous avions postulé nous ont répondu positivement. Nous décidons donc d'accélérer notre descente car il nous reste cinq heures de route et nous espérons commencer dès le lendemain. Malheureusement notre future patronne a omis de nous donner l'adresse du lieu. Nous finissons donc par arriver en soirée à Tauranga, grosse ville située à une trentaine de kilomètres en amont de Te Puke où est supposé être le travail, et par y passer la nuit dans une petite rue du centre-ville car nous n'avons pas de nouvelles de sa part.
Le lendemain, après quelques investigations, nous finissons par trouver une adresse et nous décidons de nous y rendre directement. Coup de chance, il s'agit bien de la maison des producteurs. Il est cependant trop tard, nous ne pourrons pas commencer aujourd'hui. Nous nous installons donc, c'est d'ailleurs l'occasion de prendre une douche bien méritée (et surtout nécessaire!) !


Sans nouvelles de Jules pendant deux jours nous décidons de le contacter. Rendez-vous est pris pour dîner chez eux à Kaeo le lendemain soir (dimanche). Nous sommes obligés de rester à Kerikeri deux jours de plus, ce qui ne nous enchante pas plus que ça. Cela nous permet cependant de ne pas rater la parade de Noël de la ville où petits et grands défilent au nom de leur club ou de leur entreprise. L'ambiance est sympathique mais extrêmement commerciale : la paroisse et les banques se mêlent pour distribuer leurs brochures tandis que les enfants brandissent fièrement leur casquette McDo attrapée à la volée.

Nous prenons notre premier petit-déjeuner néo-zélandais au Café Blue. Nous choisissons la petite portion (le « baby breakfast ») composé uniquement de deux œufs frits, de bacon grillé, de saucisse, de deux nuggets de poulet, de toasts, de beurre et d'une demie-tomate accompagnés copieusement d'une feuille de salade... Nous voila repus (et un peu écœurés) pour la journée...

Semaine 6 : A la découverte des kiwiberries
Le soir venu, nous retrouvons toute l'équipe de backpackers (l'équipe fixe rentrant bien sûr chez elle) dans les locaux mis à notre disposition en échange de l'équivalent d'une heure de travail par jour chacun. Celle-ci est essentiellement composée de (très) jeunes allemands qui se cherchent un peu après leur bac. Bien que sympathiques, ce n'est pas avec eux que nous passerons nos soirées. Ils passent en effet le plus clair de leur temps à parler en allemand sans considération pour les autres nationalités présentes. Nous nous entendons nettement mieux avec un couple de gallois qui a posé ses valises ici depuis plusieurs mois : Ruby et Jon.
Notre premier week-end arrive rapidement. Au matin du samedi Loïc tombe sur un bébé oiseau échoué au beau milieu de la cour. Nous ne comprenons pas bien d'où il a bien pu tomber et nous essayons de le placer à l'abri mais visible des autres oiseaux en espérant que ses parents le récupèrent. Les heures passent et notre oisillon esseulé ne rejoint toujours pas son nid. Nous nous disons qu'il a peut-être été chassé du nid car il aurait été malade ? Nous décidons donc de le prendre sous notre aile (nous savons que nous allons un peu à l'encontre de la nature mais nous n'avons pas le cœur à le laisser). Heureusement il n'est plus « rose » mais recouvert de toutes petites plumes noires où sont encore accrochés des petits bouts de son duvet. Nous nous renseignons un peu sur internet. Alphonse, puisque c'est ainsi que nous l'avons baptisé, devrait avoir une quinzaine de jours. Par chance, il n'est plus censé manger toutes les demie-heures, mais nous allons devoir essayer de lui concocter des petit-déjeuners super protéinés. Il est un peu sous le choc donc nous finissons par devoir lui forcer un peu le bec pour avaler des petits bouts de poulet savamment hachés et mélangés à de l'eau. Nous le laissons un peu se reposer dans un petit carton à l'extérieur, le temps d'aller nous balader dans les environs.
Nous décidons de nous rendre au Mont Maunganui, à environ 20mn de là. Quand nous arrivons nous découvrons que cette petite ville balnéaire très touristique se situe au pied d'un petit volcan formant le bout d'une péninsule. Ainsi la mer est partout. Nous nous disons que cela doit être assez amusant d'être dans les immeubles et de voir la mer de chaque côté. Nous empruntons un petit sentier qui fait le tour du mont en environ 1h. La balade est très agréable et la vue sur la mer et les petits lagons de la péninsule d'en face est superbe. Le début du trajet est quelque peu gâché par l'énorme port industriel qui fait vivre la ville, heureusement celui-ci est vite masqué et nous nous retrouvons vite entouré de paysages apaisants. Quand nous arrivons au bout du sentier (qui est finalement très proche du point de départ) nous débouchons sur une immense plage bordée de commerces où se déroule une grande compétition de beach-volley.
Quand nous rentrons, nous découvrons notre Alphonse nettement plus détendu. Il a même fait quelques pas à l'extérieur de son nid en carton pour se chauffer dans un rayon de soleil. Il ne veut toujours pas manger tout seul mais il a tout de même l'air un peu plus vivace. Nous lui confectionnons un petit nid avec des chutes de tissu et des brins de laine trouvés dans la cour et l'installons dans un des bacs à chaussures de notre van, agrémenté artistiquement de feuilles et de branchages, où il ne tarde pas à s'endormir.
Le lendemain il va beaucoup mieux. Il lui arrive même de s'ébrouer et de se lisser un peu ses toutes nouvelles plumes. Il a l'air assez fier de nous entendre nous exclamer, admiratifs, quand il déploie ses minuscules ailes et prend plaisir à se caler dans nos mains. Il a pris une totale confiance et consent désormais à se nourrir en attrapant les petits bouts de viande que Loïc agite au bout de son doigt.

Nous commençons donc notre semaine de travail le mercredi matin. Nous travaillons pour Iwik Management, petite entreprise familiale produisant des citrons, des prunes, et bien sûr, des kiwis. Ce n'est pas la saison de la récolte et notre tâche est de nous occuper des plantes. C'est avec plaisir que nous découvrons que les producteurs, toujours en recherche de nouveautés, ont décidé cette année de tenter la culture d'une nouvelle espèce de kiwi : le kiwiberry. Ce kiwi de toute petite taille (environ 2-3 cm de long) se mange tout entier, avec la peau, comme une baie. Notre travail est de faire que cette plante, originellement une liane, forme un petit arbre à la base et de nombreuses lianes à environ 1m70 du sol se répartissant ensuite sur tout un réseau de fils de fer. Nous passons donc nos journées à couper des feuilles et branches indésirables, vérifier la bonne santé des greffons, enrouler les lianes dans la bonne direction, former les branches maîtresses et répartir les lianes secondaires sur les fils de fer et les ficelles, de façon différente selon le caractère mâle ou femelle du plant. Bien que pas tous les jours stimulant, il est très intéressant de découvrir tout l'univers complexe de la production de kiwi dès la genèse de la plante.


Semaine 7 : Kiwifruits et rivières bouillonnantes
Le lundi matin nous laissons, un peu à regrets, Alphonse dormir dans le van aéré. Nous sommes un peu inquiets car il n'a pas voulu se nourrir. Nous ne savons pas si l'horaire était un peu tôt pour lui. Par chance, un vrai déluge s'abat sur le verger et nous rentrons au van en début d'après-midi, ravis de pouvoir nous occuper un peu de lui. Quand nous arrivons, Alphonse n'a pas bougé de son nid. Il semble dormir mais en réalité, il n'a pas survécu. Nous ressentons une immense tristesse pour ce petit oisillon auquel nous nous étions si vite attaché, mais nous savions que les chances de le relâcher dans la forêt de Puketi comme nous espérions le faire étaient minces. Loïc lui improvise un petit tumulus et c'est ainsi que s'achève la fugace aventure d'Alphonse sur Terre.
Le beau temps étant revenu, nous décidons de nous renseigner pour savoir si il y aurait des heures supplémentaires à nous donner, car nous sommes payés à l'heure et non pas à la journée. Jenny, la maîtresse de maison, nous charge de désherber son potager. Cela fait, et satisfaite de notre travail, elle nous donne comme mission de désherber les innombrables pots de bébés citronniers. Cette tâche va nous occuper de nombreuses heures. Associées à nos 45h dans les kiwis (une semaine normale de travail ici en compte 40) nous parvenons ainsi à faire des semaines d'une cinquantaine d'heures de travail.
Le samedi est pluvieux et nous ne profitons que très peu du début de notre week-end. Nous en profitons un peu pour désherber quelques heures. Le lendemain, le ciel se dégage, et avec Ruby et Jon nous décidons de descendre un peu plus bas que Rotorua, vers la Kerosene Creek dans la Waikite Valley pour prendre notre premier bain en zone géothermique. Et c'est donc amusés que nous plongeons un premier orteil dans un lac chauffé à une quarantaine de degrés. Le lieu est magique. Le lac est entouré de superbes montagnes verdoyantes. Une berge de l'autre côté laisse échapper un peu de fumée et nous glissons avec délice dans cette immense baignoire. Il est un peu frustrant de ne pas pouvoir mettre la tête sous l'eau, mais les nombreux minéraux et gaz peuvent être extrêmement nocifs pour les voies respiratoires. Car oui, difficile d'en faire abstraction... l'odeur ici est épouvantable ! Étrangement, plus nous nageons vers le centre du lac plus celle-ci se dissipe mais l'odeur soufrée reste malgré tout omniprésente, d'autant plus sur nous et sur tous nos vêtements quand nous ressortons de l'eau !
Nous avons aperçu sur la route des panneaux indiquant des mares de boue bouillonnante. Nous ne résistons pas et allons voir. C'est un bien étrange spectacle de voir cette boue lisse et d'un beau gris clair gonfler doucement un peu partout avant d'éclater en bulles sonores. Les informations disséminées sur des panneaux nous apprennent qu'en fait, les gaz jaillissant ici sous forme de bulles sont tellement acides qu'ils ont fait fondre la roche, la transformant ainsi en boue. Cela ne donne pas envie de s'y rouler...
Nous nous séparons des gallois qui ont à faire et empruntons un chemin un peu au hasard. Une immense fumée dans les arbres attire notre attention. Cela ne ressemble pas à un feu de forêt et nous décidons de nous approcher. Nous tombons ainsi sur la rivière Otamakokore dont la température de l'eau s'élève à pas moins de 98° ! Difficile de la voir, en fait, au milieu de toute cette vapeur. Mais quand un coup de vent la dissipe quelques secondes nous pouvons voir un mince filet d'eau filant à toute vitesse dans la végétation. Des concrétions blanches se sont formées sur ses berges et il fait un boucan de tous les diables. Ici, pas d'odeur de soufre. Un camping s'est installé juste à côté et a construit des piscines pour que l'on puisse profiter de cette eau riche en minéraux sans se brûler. Le lieu est assez enchanteur et le prix plutôt raisonnable (25$/pers soit une quinzaine d'euros) compte tenu des prestations. Nous notons cela dans un coin de nos têtes et nous disons que quand nous reviendrons dans la région nous pourrons nous faire un petit plaisir en passant une nuit ici.


Semaine 8 : Petite insertion en territoire Waikato
Cette semaine nous délaissons les kiwiberries (qui doivent maintenant grandir un peu en attendant de s'en occuper à nouveau) pour nous consacrer à une tâche qui a été quelque peu délaissée depuis quelques années : la taille des plants mâles de kiwifruit, qui ont fini leur travail de fertilisation, pour laisser un maximum de place aux plantes femelles, porteuses des fruits, et surtout pour laisser entrer la lumière sous les lianes qui forment une épaisse toiture de feuilles. Ce travail, bien que protégé de l'intense lumière du soleil (nous sommes juste sous le trou dans la couche d'ozone et nous le sentons : ici le soleil pique !), est harassant. Les bras en l'air et le cou cassé vers l'arrière en permanence nous coupons, coupons, coupons toute la journée des branches. Nous sommes dans une pénombre continue et pourtant les lunettes de soleil sont indispensables car des poussières de bois mort, de poils de kiwis et de petits morceaux de feuilles sèches nous tombent en permanence dans les yeux. Ils parviennent toujours à s'insinuer sous les verres de nos lunettes et nous rentrons tous les soirs avec les yeux rouges et gonflés.
Les allemands sont repartis vers d'autres aventures et il faut avouer que nous sommes tous soulagés car ils faisaient beaucoup de bruit et monopolisaient beaucoup l'espace ! Nous nous retrouvons donc les soirs avec Ruby et Jon et papotons, mangeons et partons pêcher. Jon, qui s'y connaît bien, nous donne quelques astuces et c'est avec plaisir que nous attrapons enfin de quoi dîner !
Quand le vendredi soir arrive enfin nous décidons de nous faire un bon repas d'adieu composé notamment de moules de Coromandel. Ruby nous prépare le cheese-cake de sa mère et nous passons ainsi des heures à table à manger et plaisanter. Nous repartons le lendemain après avoir passé la matinée à remettre en ordre notre van et échangé nos coordonnées avec Ruby et Jon. Dans quatre jours nous avons rendez-vous à Puketi pour garder la maison de Jules et Anouk et nous avons décidé de profiter de ce long week-end pour nous rendre sur la côte ouest du Waikato, important bastion maori.
Notre première étape se fait à Cambridge. Cette charmante bourgade a des airs d'Angleterre. On sent ici pleinement le passé colonial et les rues sont très agréables. Nous arrivons hélas un peu tard (18h...) et tout est fermé mais nous nous disons que la ville doit être assez animée en journée.
Nous continuons jusqu'à Hamilton, quatrième plus grande ville du pays, où nous avons décidé de passer la nuit. Nous cherchons directement un endroit où camper et tombons sur un petit espace abrité à l'entrée de la ville, situé juste à côté des fameux Hamilton Gardens et juste en face d'un pré où les propriétaires de chevaux viennent faire paître leurs animaux (nous sommes dans une région assez riche). Vers 22h, une voix nous interpelle depuis l'extérieur. Nous nous disons que l'on risque de se faire chasser ou peut-être mettre une amende et nous sortons à contrecœur. Il s'agit en fait d'un jeune maori qui, venu déposer son cheval en voiture, s'est retrouvé en panne de batterie et avec le téléphone à plat. Nous lui venons donc en aide avec plaisir et tandis que nous branchons ses câbles sur la batterie du van nous papotons un peu avec lui. Il est très content de nous avoir trouvé là et espère pouvoir nous être utile. Il nous demande donc si nous avons l'intention d'aller visiter les célèbres Waitomo Caves, des grottes situées non loin de là. Nous lui répondons que c'est bien évidemment au programme. Il nous apprend que sa famille possède l'une des grottes et que pour nous remercier il nous y fera rentrer gratuitement (à 50$ l'entrée par personne le cadeau n'est pas négligeable!). Nous n'avons qu'à l'appeler quand nous y serons. Il nous rassure également en nous expliquant que beaucoup de gens viennent camper là où nous nous trouvons, parfois plusieurs semaines et avec de vrais camping-cars et qu'il n'y a aucun risque. Nous nous séparons, tous ravis et soulagés.
Le lendemain nous partons visiter la ville. La balade commence tout logiquement par les Hamilton Gardens. Un ensemble de jardins construit sur ce qui était encore, il y a 10 ans, une grande décharge. Les jardins sont thématiques (Renaissance, japonais, maori,...) et se rejoignent tous en plusieurs points par des carrefours. C'est un vrai labyrinthe. Nous n'avons pas le temps de tout visiter, il faut probablement une journée entière pour cela. Nous partons donc vers le centre-ville. Il n'a absolument aucun intérêt... Sur une place, un sapin géant nous rappelle que c'est Noël dans quelques jours. Une piste de patin à glace en plastique a été montée et juste à côté des enfants jouent dans une fontaine, c'est un étrange tableau ! Nous partons déjeuner dans le restaurant le Furnace sur Victoria Avenue. Bien que proposant les habituels menus nous découvrons avec plaisir qu'il y a des plats plus originaux à la carte et c'est avec un divin délice que nous dégustons des plats d'inspiration orientale parfaitement cuisinés. Quel plaisir d'être dans un restaurant et de manger autre chose que les éternels burgers et fish & chips ! Nous partons faire une agréable petite balade digestive sur les bords de la Waikato River, le plus grand fleuve du pays.
Nous arrivons à Raglan dans la soirée. La ville est vraiment très agréable. Elle réussit un savant mélange de calme et d'animation bon enfant qui donne envie d'y passer un peu de temps. Nous nous rendons sur une plage légèrement en dehors de la ville pour assister à un superbe coucher de soleil. Pour une fois, aucun panneau n'interdit de camper sur le parking et nous en profitons. Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à avoir eu cette idée.
Le lendemain matin nous sommes réveillés à 6h par un gros bonhomme qui frappe au carreau. Il nous dit que nous n'avons pas le droit de dormir là et qu'il a pris notre plaque d'immatriculation. S'il nous revoit camper dans le coin il nous donnera une amende. D'après une brochure que nous avons pris bien soin de lire de long en large et en travers, il est théoriquement autorisé de camper partout sauf là où c'est interdit par un panneau. Mais bon, inutile de discuter, il ne faudrait pas lui donner envie de nous donner une amende... Nous voilà réveillés tôt. Tant mieux, nous avons un peu de route pour remonter vers le nord (nous aimerions avoir dépassé Auckland avant ce soir) et devons d'abord redescendre un peu pour aller visiter les grottes.
Nous partons donc vers Waitomo. Un petit coup de fil à Ahu (prononcer Arou) et nos billets sont réservés pour la grotte principale, la fameuse Glow-worm Cave. Il y en a deux autres, Raukanui et Aranui. Nous découvrons que des balades en rafting de plusieurs heures peuvent être effectuées dans Raukanui Cave. Le prix est correct et nous nous disons que nous repasserons dans le coin pour visiter cette grotte-ci de cette façon (en plus elle est plus chère que les autres en visite toute simple alors autant s'amuser un peu!). Nous nous offrons une entrée pour Aranui Cave (50$ également, c'est très cher payé mais une fois de temps en temps et avec l'autre entrée gratuite cela compense un peu...) et commençons les visites. Nous commençons par découvrir la Glow-worm cave. Un très mauvais guide nous balance un speech appris par cœur bourré de blagues idiotes et sans réelle information (comme comparer un stalagmite à une crotte de chien...). Nous essayons de faire abstraction et de nous contenter d'admirer la magnifique grotte et ses nombreux vers luisants. Le clou du spectacle arrive enfin... Une rivière souterraine passe encore dans ce réseau de galerie et forme un lac. Nous montons tous dans des barques et nous glissons sans bruit sur l'eau, dans le noir. Nous nous retrouvons alors au milieu du lac souterrain, entouré de milliers de vers luisants formant une vaste voûte étoilée. L'instant, trop court, est féerique. Nous ne savons plus où donner de la tête. Ces petits vers luisants savent comment faire taire un groupe de 40 personnes...
Nous ressortons de là, pressés de rentrer dans la seconde grotte. Pour cela nous devons prendre le van quelques minutes pour rejoindre notre groupe sur un parking un peu plus loin. Ce guide là est beaucoup moins agaçant et nous sentons aussi que cette grotte est un peu moins visitée et que nous sommes le dernier groupe de la journée. L'ambiance est beaucoup plus détendue. Pas de vers luisants ici, mais des formations incroyables. Les concrétions ont formé des cascades de sucre glace et de neige, des drapés où filtre la lumière et des formes qui laissent place à notre imagination. Nains, sorcières ou même légumes ont pris possession du lieu ! Notre guide nous montre même des bébés wetas cachés dans la pénombre. Ces sortes de sauterelles géantes sont encore toutes petites, elle ne font que 5 cm...
Il est finalement temps de repartir, plusieurs heures de route nous attendent encore. Nous arrivons en soirée à Red Beach. Nous sommes toujours dans le district d'Auckland mais nous avons dépassé la ville. Un petit fish & chips en bord de mer et il est déjà l'heure d'aller se coucher dans une petite rue tranquille.





Nous nous rendons ensuite au Waikito Museum. L'entrée est gratuite et les expositions intéressantes. Art moderne kiwi, art traditionnel maori... Nous en apprenons davantage sur la culture maorie et découvrons notamment qu'un premier roi avait été élu pour rassembler tous les peuples maoris et parlementer ainsi plus aisément avec les britanniques et que la tradition a perduré depuis. Ainsi il y a actuellement une reine des maoris. Une exposition retrace également l'implication de la Nouvelle-Zélande et des maoris dans la première guerre mondiale, aux côtés des anglais. Cet épisode est totalement ignoré chez nous, et il est très intéressant de voir cet aspect de la guerre vécu par des gens qui étaient littéralement à des milliers de lieues de tous ces événements et se retrouvaient malgré tout totalement impliqués.
Nous remontons en voiture, direction la petite ville balnéaire de Raglan. Sur la route nous nous arrêtons au Bridal Veil Fall qui porte bien son nom. Le fin ruisseau se précipite dans un trou d'eau après une chute de 51m formant ainsi une longue traîne blanche et mousseuse. Le vent dissémine des gouttelettes lui donnant l'air d'être faite en une gaze aérienne.
Semaine 9 : La maison dans la forêt
Notre rendez-vous chez Jules et Anouk est pour aujourd'hui. En remontant vers le Far North nous faisons un petit détour vers Matakohe pour aller visiter le Kauri Museum dont tout le monde nous dit qu'il s'agit du plus beau musée du pays. Nous nous acquittons de nos 25$ de droits d'entrée chacun et entamons la visite de ce musée qui s'avère effectivement superbe. Outre en apprendre davantage sur le kauri lui-même, nous nous retrouvons plongés au XIXe siècle, à l'époque où de nombreux pionniers venus du Royaume-Uni se sont installés pour exploiter le bois parfait de cet arbre immense, imputrescible et sans nœud. Nous pouvons également visiter le reste de cet ancien village colonial : l'ancien bureau de poste, la minuscule église des colons et l'école à classe unique début XXe.
Nous arrivons enfin vers 20h dans la forêt de Puketi. La petite famille nous quitte le lendemain matin et nous prenons possession de nos quartiers. Nous réalisons que cela fait environ trois mois que nous n'avons pas eu un endroit juste à nous et avec un vrai lit. Les deux chiennes, Little et Nemeu, sont vieilles et adorables. Elles sont ravies d'avoir de nouvelles mains pour les câliner sans cesse.
Le 25 décembre nous nous apprêtons à fêter Noël. Nous ne ressentons pas vraiment l'ambiance de cette fête mais c'est l'occasion de se faire un beau festin. Nous avons déjà préparé une bûche vanille-chocolat et un pâté de campagne qui nous attendent dans le frigo et, comble du bonheur, nous nous sommes fait le luxe de nous acheter 100 petits grammes de Saint-Agur (12$...) au supermarché. Le matin, nous découvrons qu'un opossum a été tué dans le piège installé par Anouk pour protéger son potager. Nous n'avons pas le cœur de bêtement l'enterrer dans le jardin et nous décidons de récupérer sa peau et sa viande. Quelques investigations nous permettent de découvrir que sa chair est tout à fait comestible et qu'elle était même largement consommée par les esclaves noirs-américains. Nous récupérons donc sa fourrure qui est particulièrement douce, le vidons de ses entrailles (l'occasion de vérifier qu'il est semble-t-il en parfaite santé) et congelons le malheureux. Nous ne le servirons pas pour Noël, nous avons déjà prévu du poulet.
Il faut savoir que l’opossum est considéré comme invasif dans le pays. Il a été introduit pour tenter d'endiguer la propagation très rapide des lapins qui avaient eux-même été introduits pour leur fourrure. Évidemment cette brave bête, pas folle, a trouvé beaucoup plus pratique de s'attaquer aux oiseaux endémiques du pays, qui ne savent pas voler, qu'à des lapins qui courent beaucoup plus vite. Résultat, il n'y a jamais eu autant de lapins et la population d'oiseaux endémiques décroit... Cela se passe de commentaires n'est-ce-pas ?
Nous commençons le travail de la peau en espérant ne pas tout rater et obtenir dans quelques jours une belle fourrure toute propre et bien tannée.
Après cette activité de Noël quelque peu originale nous nous mettons à table pour fêter enfin Noël avec en entrée des brochettes crevettes-litchis servis sur une feuille de bananier, une terrine de campagne et pain maison, puis un poulet servis avec carottes aux raisins-secs et pommes de terres sautées, un plateau de fromage, bûche en dessert bien sûr et petits gâteaux secs à la vanille, le tout arrosé de bière (à défaut de champagne). Finalement, pas besoin d'un sapin de Noël !
Nous consacrons les jours suivants à fignoler vraiment notre van. Nous attendions ce séjour car nous savions que nous aurions accès à des outils un peu plus élaborés que notre tournevis et notre scie et surtout à une machine à coudre (bien que nous ayons déjà cousu des mètres et des mètres de coussins et de rideaux à la main).
Un second opossum se fait prendre dans le piège. Nous sommes un peu dégoûtés par ce système totalement vain et décidons de ne plus mettre le piège en place systématiquement. Nous nous en voulons un peu mais nous disons qu'aucun légume n'est mûr dans le potager et que les pertes seront raisonnables. De plus lorsque un opossum est pris dans le piège cela n'empêche pas les autres d'aller se servir.

Notre van : avant/après
Mode jour
Mode nuit

Semaine 10:La Paresse des Fêtes
En attendant la nouvelle année nous profitons d'avoir une maison rien qu'à nous et des chiennes à cajoler pour bailler aux corneilles et nous faire tout un tas de petits plats.
Nous faisons tout de même une balade dans la forêt de Puketi, courte mais agréable. Nous nous rendons également sur la Karikari Peninsula, située à une bonne heure de route vers le nord pour profiter un peu de la plage et du panorama dans un petit coin de Matai Bay dont Jules nous avait parlé. Le lieu, bien que très fréquenté par les locaux, est magnifique. La perspective sur la mer et la côte découpée semble n'en plus finir. La chaleur accablante nous fait rentrer plus vite que nous l'aurions voulu.
Le réveillon du Nouvel An arrive ensuite sans vraiment se faire remarquer. Nous nous renseignons un peu pour découvrir qu'il ne semble pas y avoir de festivités organisées dans la ville voisine à cette occasion. Tant pis, nous en profiterons donc pour goûter à notre petit mijoté d'opossum ! Nous le faisons donc cuire trois bonnes heures dans un bouillon et du vin blanc et le servons accompagné de pommes de terre, haricots et patates douces (nommées ici kumara). Le résultat est délicieux ! La viande est parfaitement tendre après cette longue cuisson et se marie à merveille avec une bonne moutarde. Seuls les membres sont comestibles cependant, le reste de la chair ayant conservé le goût désagréable de l'odeur...
Nous retrouvons quelques jours plus tard Jules et Anouk qui font étape quelques heures avant de retourner camper non loin de là. Ils sont absolument fascinés de découvrir que les opossums se mangent et sont même bons et de voir combien leur fourrure est facile à récupérer et à traiter. Ils nous montrent le fumoir dans le jardin. C'est une aubaine, nous allons pouvoir finaliser le tannage ! De leur côté ils sont bien décidés à ne plus jeter les victimes des pièges et à en parler à tous leurs amis !

Semaine 11 : Vers Coromandel Peninsula
Le lendemain, la pluie s'est calmée mais il faut laisser un peu de temps aux cours d'eau pour redescendre, nous programmons donc notre ascension pour le lendemain (la réservation du refuge étant obligatoire) et visitons la ville de Thames. Celle-ci, très touristique, dispose dans sa rue principale de nombreux bâtiments coloniaux encore en parfait état. Dans les zones résidentielles, de nombreuses maisons XIXe arborent toujours leurs jolis motifs de bois ouvragé aux frontons.
Nous partons camper juste en face du départ de la marche et partons dès le lendemain matin avec notre petite tente pour notre première randonnée néozélandaise ! C'est une mise en jambe légère : le premier jour de marche n'étant que de 3 heures, mais le dénivelé est assez marqué et, surtout, de hautes marches ont été taillées dans la roche sur toute la route, obligeant à lever le genou au-dessus des hanches. C'est assez fatiguant. Ces marches ont été taillées autour de 1920 pour aider les bœufs et les chevaux à gravir la montagne pour apporter les provisions hebdomadaires aux camps de bûcherons (cette zone étant une ancienne forêt de kauris décimée par les pionniers). Quand nous arrivons en haut de la montagne le paysage s'ouvre enfin sur une forêt vallonnée à perte de vue. Des rochers accrochés à de petites montagnes dessinent des formes géométriques superbement imparfaites : voici les fameuses Pinnacles.
Nous montons notre campement au pied du refuge (l'option tente étant nettement moins chère que de réserver un matelas dans le refuge). Celui-ci se trouve juste à côté du Dancing Camp Dam, l'un des derniers barrages encore visible parmi la centaine que comptait la région en ce début de XXe siècle. Ceux-ci permettaient de relâcher d'un coup une très grande quantité d'eau, charriant ainsi en même temps des centaines de troncs de kauris jusqu'au bas de la vallée.
Ainsi débarrassés de nos sacs, nous partons à l'assaut des Pinnacles. La montée s'amorce avec un nombre désespérant de marches de bois. Des marches de métal plantées ça et là dans la roche permettent ensuite l'ascension des zones les plus raides jusqu'à atteindre un petit belvédère d'où l'on peut observer les montagnes tout autour et, au loin, la partie ouest de la Bay of Plenty. Nous avons de la chance : il fait beau et le regard porte jusqu'à la mer.
De retour au camp, nous réalisons que nous avons omis d'apporter de quoi nous occuper jusqu'au soir, nous nous couchons donc avec les poules et à la dure car notre matelas gonflable s'avère être garni d'un magnifique trou.
Le lendemain nous entamons la redescente. Nous retournons jusqu'à l'Hydro Camp qui se trouve environ à une heure de là et nous engageons ensuite sur un nouveau chemin : la Billy Goat Track. Ce chemin, bien moins emprunté que celui de la veille, en est également bien différent. La forêt semble bien plus sauvage et le chemin argileux se transforme visiblement souvent en rivière (il y a d'ailleurs un fond d'eau car il bruine) ce qui le rend très irrégulier et très glissant. Sur la route, de superbes cascades dévalent des pentes vertigineuses et nous croisons des tronçons de l'ancienne petite voie de chemin de fer à flanc de montagne qui servait également au transport du kauri. Nos jambes tremblotent suite à ces 5 heures de descente quand nous arrivons enfin à la rivière. La traversée à gué offre un instant délicieux de rafraîchissement avant de retourner en ville pour quelques courses et un bon chocolat chaud.

Plus que quelques jours à Puketi avant de reprendre la route. Nous nous confectionnons une grosse réserve de sablés à la confiture et partons visiter une autre attraction tristement incontournable de la région, le mémorial en l'honneur du Rainbow Warrior qui fut coulé au large de Matauri Bay par des agents des services secrets français, faisant ainsi une victime. Le bateau de Greenpeace protestait alors contre des essais nucléaires français dans le Pacifique. Le Mémorial domine une superbe baie parsemée d'îles vertes où, d'après un local avec lequel nous papotons, des orques viennent parfois se détendre. Pas aujourd'hui malheureusement.

Le 7 janvier arrive finalement. Nous sommes un peu tristes de quitter cette maison et les deux chiennes auxquelles nous nous sommes attachées, et en même temps heureux de reprendre notre périple. Nous avons encore tant à voir !
Nous repartons donc en direction du sud et de la Péninsule de Coromandel. Nous faisons étape sur le parking d'une église d'Auckland ; l'occasion de manger des moules dans un petit restaurant servant des bières belges. C'est un pur bonheur de redécouvrir le goût d'une bonne bière ! Nous en profitons le lendemain matin pour faire faire tous nos niveaux dans une petite entreprise spécialisée dont l'ancien propriétaire du van nous avait parlé. L'occasion d'un petit check-up et d'une vidange bien méritée, sans avoir ensuite à se trimballer tout le matériel poisseux...
Nous arrivons à Coromandel en fin de matinée et sous une pluie battante. Nous souhaitions faire une randonnée le lendemain qui oblige à traverser une rivière à gué (le pont s'est effondré il y a quelques années et plutôt que de le réparer ils l'ont tout simplement enlevé!) : la Pinnacles Track en passant à l'aller par la Webb Creek Track et au retour par la Billy Goat Track (s'achevant par cette fameuse traversée qui, si elle est inondée, oblige à faire un détour de cinq heures). Cela sera impossible, tous les cours d'eau débordent (en témoigne cette rivière recouvrant la chaussée et nous obligeant à prendre un camping sur la route plus tôt que nous l'espérions).



©Hors-Saison
©Hors-Saison
Semaine 12 : Péninsule, geysers et volcans
Le lendemain nous décidons de partir explorer le reste de la péninsule. Le tour sera assez rapide car il n'y a pas grand chose au-delà de Coromandel Town où nous nous arrêtons manger un morceau. La ville est plutôt agréable et nous y trouvons une canne à pêche pour un prix défiant toute concurrence : 30$ avec le moulinet !
La route pour atteindre la pointe nord est particulièrement mauvaise mais nous sommes entourés de vallons verdoyants qui plongent dans la mer, ce qui nous fait oublier les cahots et le temps maussade. La nature sauvage est presque embellie par cette grisaille électrique. Nous sommes bloqués sur la route par une rivière qui la traverse (encore une) et nous nous installons au camping précédent, peuplé d'innombrables oiseaux.
Le lendemain, la pluie a fait place à un soleil radieux et la péninsule revêt un visage nouveau, gai et fleuri. Nous rejoignons la côte est par Whitianga, une grosse station balnéaire assez désagréable où nous passons la nuit.
Nous quittons Whitianga en n'ayant qu'une hâte, voir Cathedral Cove, un trou creusé dans la roche par des milliers d'années d'érosion. Il pleuviote mais cela n'a pas découragé les nombreux autres touristes qui entament la balade. Après 45mn d'une petite marche en forêt nous atteignons une superbe petite crique de sable blanc où des morceaux de roches tombés dans la mer servent d'abris pour les oiseaux qui observent le flux incessant des visiteurs avec une certaine lassitude. Le trou dans la roche porte bien son nom. Il forme une grande arche profonde, et quand nous sommes dessous l'espace est vaste et haut comme une nef.
Nous nous dirigeons ensuite vers Hot Water Beach située non loin de là. Deux sources chaudes jaillissent dans le sable et si nous sommes là deux heures avant et deux heures après la marée basse nous pouvons creuser des petites baignoires dans le sable qui se rempliront d'une eau à 65°. Il ne reste plus qu'à laisser l'eau de mer s'infiltrer pour réguler la température pour se créer un petit jacuzzi. Il fait tout gris, c'est marée haute, et il y a déjà un monde fou. Cela nous décourage illico d'attendre la marée descendante.
Nous quittons donc la péninsule de Coromandel.
Plusieurs heures de route nous conduisent dans la région de Rotorua que nous souhaitons explorer plus amplement que la dernière fois. Nous nous arrêtons dans un camping près d'un joli lac où malheureusement la présence de truites nous interdit de pêcher (la licence est obligatoire et gare à nous si nous nous faisons prendre à pêcher illégalement!).
Dès le lendemain matin nous nous rendons au parc thermal de Wai-o-Tapu pour voir toutes les merveilles que cette zone géothermique concentre. L'entrée coûte 32,50$ mais cela vaut le coup. Nous commençons la visite en traversant une rivière d'eau bouillante pour arriver dans une zone de cratères entourés de fumeroles : du Rainbow Crater au Devil's Ink Pot, chacun d'entre eux a des caractéristiques bien particulières en raison de la présence de certains minerais, de couches de pétrole, d'eau ou de boue.
Nous retournons donc dans le parc où un autre geyser se déclenche naturellement toutes les 8 à 36h, et un autre encore quand souffle un fort vent du sud. Ce n'est pas le cas aujourd'hui et nous ne prenons pas le risque de les attendre ! Nous arrivons finalement dans une zone du parc qui a été appelé à juste titre The Artist's Palette. Ce nom va à ravir à ce lieu incroyable. Des couleurs inouïes parsèment une sorte de lac de concrétions. A l'est une étendue blanche de silice fume doucement, face à nous le lac prend des teintes jaune soufre. Quand nous le traversons nous sommes pris à la gorge par une épaisse vapeur à l'odeur d’œuf pourri. A chaque fois qu'un coup de vent la dissipe nous apercevons, ébahis, le plus étonnant des lacs : la Champagne Pool. Ce lac bout en permanence des bulles de dioxyde de carbone dans une eau à 76° ; mais le plus étonnant ce sont ses berges d'un orange intense, dû à l'importante présence d'antimoine. Chutes d'eau chaude, falaises violettes de manganèse, lac vert fluo d'arsenic... nous n'en revenons pas de voir ce que la nature est capable de créer d'à la fois infernal et magnifique.
Nous nous rendons ensuite au camping que nous avions repéré la fois précédente. Pour un prix très raisonnable (22$ chacun) nous avons accès au camping avec sa cuisine et une vraie douche d'eau chaude (suffisamment rare pour être signalé bien qu'ici ce soit plus facile à obtenir que de l'eau froide !) mais aussi aux piscines chaudes d'eau de la rivière bouillonnante, refroidie par des systèmes de cascades. Nous nous délassons avec plaisir dans ces grandes baignoires aux températures variées jusqu'à flétrir comme des pruneaux !
Le samedi, nous voilà partis vers la région du lac Taupo. Cet immense lac marque l'exact centre de l'île du nord. Celui-ci se déverse dans la Waitomo River en passant par les Huka Falls, tonitruantes chutes d'un bleu glacial. Leur force est telle qu'on dit qu'elles peuvent remplir cinq piscines olympiques en une minute.
Nous dépassons rapidement la ville touristique de Taupo, sur la berge nord et nous dirigeons vers Turangi, une ville morte sur la berge sud (ici tout le monde ne vit que pour les nombreuses activités sportives sur le lac et cela se ressent en ville). Nous ne nous y arrêtons que pour prendre des informations essentielles au Visitor Centre pour notre randonnée du lendemain. Nous nous rendons dans un petit camping gratuit au bord d'une rivière où coule une eau d'une grande pureté. Ici, toilettes sèches et pas d'eau courante ; finalement nous ne demandons pas mieux !
Nous avons l'intention d'effectuer le lendemain le fameux Tongariro Alpine Crossing, classé « plus belle randonnée à la journée de Nouvelle-Zélande ». Un système de bus permet de rejoindre le départ où les voitures sont garées, et la randonnée étant très réputée les compagnies en profitent pour faire payer le voyage de 25mn pas moins de 30$. Par chance nous trouvons deux jeunes françaises, Jeanne et Célia, qui souhaite la faire également. Nous nous arrangeons donc avec elles. Nous nous rendrons tous au parking d'arrivée où nous laisserons leur voiture et irons tous avec le van au parking de départ.
Nous avons de la chance, il fait beau tout spécialement aujourd'hui. Il y a énormément de monde et nous avons un peu l'impression de vivre un exode ! Tant pis, il faudra faire abstraction. Ce n'est finalement pas difficile avec un tel paysage. La marche débute tranquillement à plat dans un paysage d'herbes sèches entouré de montagnes. Un petit ruisseau court sous la passerelle de bois. Nous entamons ensuite une grande série de marches pour atteindre le sommet (1868m, les plus courageux pouvant ensuite monter en haut du Mount Tongariro à 1967m). Nous nous approchons du volcan brun et au fur à mesure que nous tournons autour nous découvrons une face d'un beau rouge. Nous traversons des cratères gigantesques. L'ambiance est lunaire.
Nous parvenons enfin au Red Crater. Une faille immense crée une bouche béante sur ses pentes incendiaires. En bas, de l'autre côté, les Emerald Lakes dessinent des taches turquoises et brillantes. Ce n'est pas de dévaler la pouzzolane qui nous coupe le souffle, c'est bien ce paysage qui n'en finit pas de nous émerveiller. Quand nous nous arrêtons sur les berges du Blue Lake pour pique-niquer nous nous retournons vers le paysage que nous venons de traverser : comme un dernier cadeau celui ci s'accumule comme une peinture en une diversité de plans que le Mont Ruapehu domine en toile de fond avec ses neiges éternelles. Nous entamons la redescente face au lac Taupo. Celle-ci est un peu longue mais très douce et nous nous sentons plus en balade qu'en randonnée. Quand nous arrivons enfin à l'arrivée nous sommes muets de tant de beauté. C'est une journée qui restera dans nos mémoires à jamais.
Nous retournons au camping pour nous délasser et prendre une petite douche (très) rafraîchissante dans la rivière (avec un savon propre qui ne fera pas de mal aux petits poissons bien sûr).


Nous ressortons pour être à 10h15 au rendez-vous au geyser Lady Knox situé un peu en dehors du parc. Ce geyser fut découvert par des locaux qui travaillaient là et voulaient laver leurs affaires dans de l'eau chaude. L'accumulation de savon dans le trou d'eau la fit jaillir, disséminant en même temps leurs vêtements dans les buissons alentours. Ils commencèrent à s'amuser à déclencher le geyser et à le rendre plus puissant en l'entourant de pierres (aujourd'hui parfaitement concrétionnées) pour en augmenter la pression. Le présentateur nous active donc le geyser en y versant un sachet de ce qui semble être du bicarbonate de soude. Cela provoque une réaction chimique dans les deux chambres remplies d'eau situées en dessous du geyser : le plus profond, rempli d'une eau à 170°, chauffe l'eau de la chambre supérieure initialement à une soixantaine de degrés et en augmente la pression. Nous voyons donc tout d'abord buller le geyser puis commence à s'en déverser une eau grisâtre, d'abord doucement puis de plus en plus vite. L'eau se met à grimper comme une fontaine jusqu'à atteindre une hauteur d'environ 5m sous les yeux ébahis des spectateurs. Au bout de quelques minutes le geyser diminue doucement jusqu'à disparaître dans quelques glouglous. Le geyser peut semble-t-il rester en l'air près d'une heure mais cela dépend de la pluviométrie et de la pression atmosphérique.






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Semaine 13 : Sur la côte est
Nous retournons à Turangi pour nous renseigner sur la météo. Nous souhaitons également effectuer l'ascension du Mont Ruapehu mais cette randonnée à la journée, classée assez dangereuse, nécessite de parfaites conditions climatiques et de se renseigner sur le risque volcanique. Les prochains jours s'annoncent pluvieux, nous décidons donc de quitter la région. Nous espérons avoir l'occasion de faire cette randonnée au printemps prochain, quand nous remonterons de l'Ile du Sud. Nous partons vers Napier et la Hawkes Bay qui bénéficient d'un climat parfaitement radieux. La route entre Taupo et la côte est, et toute la baie en général, sont superbes. Les montagnes et les vallées s'enchaînent, coupées parfois par de profondes gorges où coulent des rivières agitées. Moutons et vaches profitent de cet environnement avec paresse.
Nous profitons des campings gratuits du nord de la région, idéalement situés au bord de rivières ou de lacs.
Nous partons visiter Napier, située en bord de mer, qui parvint à littéralement renaître de ses cendres après avoir été presque entièrement détruite par un tremblement de terre en 1931. Des architectes visionnaires eurent la bonne idée de la reconstruire entièrement selon un style Art Déco qui fait encore la renommée de la ville. Le côté Art Déco, justement, nous déçoit un peu. Nous pensions trouver une ville toute en volutes et en courbes un peu comme la maison Horta de Bruxelles ; mais le style y est en fait très géométrique et un peu sévère. Ceci dit, la ville n'est pas désagréable et très vivante. Nous passons par Hastings, la ville voisine qui arbore également quelques bâtiments du même genre mais dans une moindre mesure et filons vers Cap Kidnappers. Une colonie de Fous de Bassan s'installe ici tous les ans entre Novembre et Mai et nous espérons bien les voir. Nous sommes stupéfaits de découvrir en arrivant que la route y menant a été privatisée pour que seuls les bus des compagnies touristiques puissent y accéder. Pour y aller à pied il faut emprunter la plage aux heures de marée basse sur 18 km, soit 5h aller-retour. Nous sommes juste en début de marée haute et les heures de marée basses pour les jours à venir sont très tôt le matin ou vers 19h. Ingérable donc. Nous repartons très déçus en pestant allégrement sur nos guides de voyage qui ne nous ont pas prévenus.
Nous continuons notre route vers le sud et nous arrêtons dans un camping situé en lisière de forêt, juste au bas d'une chaîne de montagnes qui se déverse d'un coup dans une vallée parfaitement plate sur des kilomètres. Bienvenue dans la région viticole du Wairarapa.
Nous continuons notre descente vers le sud sur la State Highway 2. Nous passons des villes assez différentes de celles que nous trouvions au nord. Alors que celles-ci étaient assez lugubres et constituées uniquement de magasins de plein pied assez vilains (tandis que l'essentiel des habitations se répartissait dans la campagne alentour), les villes du sud sont plus chaleureuses avec davantage de bâtiments de style colonial en bois. On trouve également de nombreuses petites maisons de ville, ce qui ne nous donne pas l'impression de nous promener dans des centres commerciaux à ciel ouvert.
Nous nous trouvons un petit camping gratuit en bord de rivière à côté de la petite localité de Featherston. Les locaux viennent régulièrement se jeter rapidement à l'eau par ces grosses chaleurs, d'autant plus que la rentrée des classes approche dangereusement. C'est le lieu idéal pour les observer. Il est amusant de noter que bien qu'ils se mélangent de temps à autre, Maoris et Pakeha (comme sont appelés ici les descendants des colons blancs) sont très différents. Les pakehas par exemple se baignent sans problème en bikini, tandis que les jeunes femmes maoris se baignent toutes habillées (en général un short et un T-shirt), parfois même avec des chaussettes aux pieds ! Ce ne semble pas être de la pudeur car elles sont malgré ça très exubérantes, rient fort et boivent force bières et boissons énergisantes. Avec Loïc nous nous demandons tristement s'il peut s'agir de complexes. Il faut dire que les maoris sont vraiment très gros et nous nous demandons si le changement de leur régime polynésien de poissons, légumes et fruits, au profit de l'excellentissime gastronomie british américanisée n'aurait pas fortement contribué à cet important taux d'obésité...

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Nous poussons ensuite jusqu'au Cape Palliser. Voila, nous y sommes : bienvenue à l'extrême sud de l'île du Nord. Cette portion de côte, sauvage et vide de population, est brûlée par le soleil. Tout au bout, un petit phare rouge et blanc perché en haut d'une interminable volée de marches domine l'océan. Mais ce n'est pas celui-ci qui nous fait passer un temps fou sur ces plages... Une immense colonie de phoques a élu domicile dans les rochers et se prélasse paresseusement dans des baignoires naturelles. Nous ne les voyons pas tout de suite en fait, et tandis que nous nous approchons de la berge un grognement sourd nous fait piler net : un énorme phoque sort la tête d'entre les rochers et nous regarde d'un air désapprobateur. Compris, nous n'approcherons pas plus ! Mais maintenant que nous savons où regarder ; toutes ces formes grisâtres qui se fondaient dans les rochers se révèlent enfin à nous : ce sont des dizaines de phoques ! Dans l'eau nous voyons de nombreuses nageoires apparaître et disparaître comme s'ils s'amusaient à rouler comme des tonneaux ! Un peu plus loin une colonie encore plus énorme s'ébat dans les vagues. Pour notre plus grand ravissement nous voyons de nombreux petits, noirs et minuscules, nager dans les trous d'eau avant de tenter de remonter de façon pataude sur les rochers pour rejoindre leur mère qui ne bouge pas une nageoire pour les aider : c'est en tombant qu'on apprend ! Nous finissons par quitter à regret cette joyeuse bande car quelques adultes soucieux se rassemblent pour former un bruyant conciliabule tout en nous regardant... Un petit et mauvais fish & chips devant le lake Ferry plus tard et nous remontons en direction de Featherston. C'est finalement le plus pratique pour ensuite se rendre à Wellington.
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Semaine 14 : La Capitale
Après une journée tranquille à flâner près de la rivière nous décidons de partir enfin à l'assaut de la capitale du pays : Wellington. Moins étendue qu'Auckland, Wellington est parait-il souvent boudée par les touristes qui ne s'y arrêtent que pour attraper leur ferry pour l'île du sud. Nous la trouvons pourtant moins désagréable que l'énorme et bondée Auckland (cela reste tout de même une grosse ville). Nous nous rendons tout d'abord au célèbre musée Te Papa qui abrite une énorme collection. Nous sommes un peu déçus, nous espérions en apprendre un peu plus sur les maoris mais comme partout l'histoire saute très vite aux premiers pionniers. Très interactif et esthétique, ce musée qui rassemble histoire naturelle, histoire du pays et art n'est finalement pas très informatif. De gros écrans impressionnants nous font vivre une descente vertigineuse au cœur de la terre avec une bande son tonitruante mais nous en ressortons sans en savoir guère davantage sur le processus de formation de l'île. Une vidéo raconte comment, ayant remonté par mégarde le plus gros calamar connu, ils l'ont abattu pour l'exposer fièrement dans du formol. Bref, pas pour nous tout ça.
Nous avons lu dans notre guide qu'une colonie de pingouins bleus, l'espèce la plus petite du monde (un petit pingouin mesure une vingtaine de centimètres) niche aux environs de Breaker Bay, au sud de la ville. Nous nous y rendons donc. Nous passons d'amusants panneaux « penguins crossing » et apprenons que pour les voir il faut les guetter à la tombée de la nuit quand ils rejoignent leur nid car ils passent toute la journée en mer. Nous passons donc la journée à flâner devant un agréable petit café en bord de mer. Le soir, nous partons à la recherche des pingouins. Rien à faire, ceux-ci refusent de montrer le bout du bec. Nous partons donc nous coucher avec vue sur l'océan.
Le lendemain nous remontons tranquillement vers Featherston. La petite ville se trouve en effet à une dizaine de minutes de Martinborough qui est en quelques sortes la capitale du vin de l'île du nord. Nous avons bien l'intention d'y décrocher un travail. Nous démarchons quelques cafés pour leur proposer nos services en temps que commis de cuisine, sans succès. Nous nous décidons donc à appeler les numéros de téléphone fournis par le Centre d'Information. C'est ainsi que nous trouvons un emploi dans un vignoble voisin : Craggy Range.


Nous allons manger un morceau dans un petit restaurant sympathique et pas trop cher de Cuba Street, le Matterhorn, puis partons déambuler dans la ville. Facile à vivre, la ville n'a cependant pas grand chose à offrir. Nous nous rendons à The Hive, un bâtiment construit pour abriter les bureaux du gouvernement et qui est source de nombreuses plaisanteries. En effet, la bâtisse en forme de ruche (d'où son nom) ressemble à une énorme erreur de béton absolument affreuse. Nous partons passer la nuit dans une petite banlieue bourgeoise de bord de mer située non loin de là.
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Semaine 15 : Broken shoot !
Nous nous installons pour de bon dans le camping gratuit de Featherston. Nous y montons la tente pour garder jalousement une petite alcôve dans les arbres située idéalement à l'écart.
Notre travail, ainsi que celui d'une bonne cinquantaine de saisonniers répartis en deux équipes, est d'alléger les vignes en coupant des grappes dans les zones trop encombrées, ainsi que les branches trop petites ou cassées. La seule difficulté est en fait de satisfaire les quatre superviseurs qui passent constamment dans les rangs pour vérifier notre travail. Ils ne sont manifestement pas tous d'accord sur les priorités et la définition exacte d'une « petite pousse ». Nous sommes payés au pied de vigne et nous entamons ainsi un rythme effréné où nous nous octroyons tout juste 10 minutes de pause par jour pour manger un morceau. Dès que nous oublions une branche nous avons la joie d'entendre quelqu'un nous crier « short shoot ! » ou « broken shoot ! ». Yes yes...
Lors de notre premier samedi à Martinborough nous avons l'occasion d'assister, à la sortie du travail, à une foire aux voitures anciennes. De vieilles américaines lustrées sont parquées un peu partout et des gens habillés dans des tenues des années 50 déambulent joyeusement dans les rues. Nous n'avons pas l'occasion d'en profiter très longtemps car ici les festivités s'achèvent tôt.
Une routine s'installe doucement : après le travail, petit tour éventuel à la bibliothèque pour consulter nos mails ; quelques courses ; mais surtout un plongeon dans notre rivière fraîche (en se battant un peu contre les sandflies, sortes de moucherons assez agressifs que nous avons gentiment appris à haïr ces derniers mois tant leur morsure démange). Il faut dire que les journées sont brûlantes et étouffantes : nous vivons parait-il le plus chaud mois de février depuis 1927. Notre douche solaire fonctionne donc très bien (il nous arrive de devoir la rallonger à l'eau fraîche pour ne pas nous brûler!) et une douche relaxante achève ces longues journées. Une petite bière pour arrêter de courir, un bon dîner et au lit.... Avant de recommencer le boulot à 6h30 le lendemain matin.
Nous travaillons depuis huit jours lorsque Murray, notre contractor, nous annonce qu'il n'y a plus de travail pendant les deux prochaines semaines. Coup de chance, le travail dans les plantations d'oignons où nous avions initialement postulé nous contacte pour commencer quatre jours plus tard.

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Semaine 16 : En Germanie
Après 4 jours de repos bien mérités nous arrivons donc à Greytown, une ville voisine, pour commencer le travail dans les oignons. Nous découvrons que nous allons travailler au milieu d'une multitude d'allemands de moins de 20 ans (cela s'explique par le fait qu'en faisant ce type de voyage ils se voient accorder deux points de plus à leur note de bac pour l'entrée à l'université ; idée louable en soi mais quelque peu injuste pour tous ceux qui n'ont pas les moyens de partir et qui ne se trouvent visiblement pas ici....). Ceux-ci sont tellement majoritaires que les informations (peu importantes, comme le lieu de rendez-vous du lendemain...) sont données en allemand par deux gamines assez idiotes.
Bref, nous voici donc à cavaler dans les oignons pour en couper les fleurs pour la récolte des semences. Il faut se frayer un chemin dans les hauts plants et dans de nombreuses zones les immenses chardons sont plus grands que les oignons.Nous sommes payés à l'heure. C'est un peu plus reposant mais c'est aussi l'occasion pour ces jeunes allemands d'en faire le moins possible sous prétexte de garder ce travail le plus longtemps qu'ils peuvent. Cela ne les émeut pas plus que ça de voir les fleurs sécher de jour en jour et se vider de leurs graines à toute vitesse.
Nous rencontrons cependant deux personnages fort sympathiques : Orion, un américain du Maine, et Paul, qui vient de la région de Lyon.
Un message providentiel de Murray nous annonce que le travail reprendra finalement dès le mercredi suivant à Craggy Range. Nous donnons son contact à Paul et Orion qui, comme nous, n'en peuvent plus de l'équipe et de l'odeur pestilentielle et tenace qui parfume nos vêtements.
Semaine 17 : Retour dans les vignes
Ayant travaillé sept jours consécutifs dans les oignons nous nous offrons une journée de repos avant de retourner dans les vignes. Nous y retrouvons avec plaisir certaines têtes, dont tout un groupe extrêmement sympathique venu des îles Vanuatu.
Notre travail est maintenant d'installer des filets à oiseaux sur chaque rang (dans les vignobles voisins ils sont installés à l'enjambeur sur quatre rangs , pas ici et nous ignorons pourquoi). Nous sommes à nouveau payés au pied et la course reprend. Le jeudi, Paul et Orion nous rejoignent, ravis de changer de travail.
Nous devons installer un filet de chaque côté de chaque rang et les clipper en haut et en bas à intervalles réguliers au moyen de ces petits clips en plastique qui servent d'ordinaire à sceller des sacs (de type sachets de pain de mie,...). Pour l'instant nous n'attachons que le haut, en ne clippant en bas que pour éviter que le vent ne s'engouffre dans les filets. Nous nous mettons en équipes de deux pour avancer plus vite et nous amusons à tester diverses stratégies. Avec Loïc, nous ne nous débrouillons pas trop mal !
Le samedi soir (nous ne travaillons pas le dimanche), nous invitons Orion, Paul, et sa copine Lisa à venir manger à la rivière où nous passons une soirée de détente agréable mais peu longue : nous nous effondrons tous de fatigue à 23h !
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Le lendemain nous partons visiter les gorges de Wai-o-hine, qui se trouvent un peu au-dessus de Greytown, en compagnie de Paul et de Lisa. Les gorges ne sont pas très impressionnantes mais le lieu est tranquille et reposant. Un immense pont suspendu en relie les deux rives et tangue allègrement avec la brise....
Ce week-end passe très rapidement et il va falloir à nouveau se lever avant l'aube.

Semaine 18 : Cure de raisins
Nous continuons à clipper inlassablement nos filets. Avec quelques variations cependant, qui n'égayent que peu nos journées : nous clippons maintenant de nombreux rangs de raisins blancs en haut et en bas intégralement. Le dos commence à souffrir franchement.
Sur les rangs de rouges que nous n'avons clippés qu'en haut les raisins commencent à prendre une couleur profonde et appétissante. Le temps est donc venu de faire du color thining qui consiste à couper toutes les petites grappes de raisins durs et verts qui ne mûriront jamais, les grappes vertes à plus de 30% ou de 50% (selon les parcelles) ou les grappes, mûres ou non, qui se trouvent sur des small ou broken shoots (encore eux). Cela nous fait mal de voir ces belles grappes tomber à terre et nous les goûtons. Malheur à nous ! Le raisin est déjà si bon, sucré et juteux, que nous ne pouvons plus nous arrêter et nous avalons quasiment tous les raisins mûrs destinés à passer sous les lames de nos sécateurs !
L'activité n'arrange cependant pas nos douleurs de dos et les passages du soir à la rivière ne sont plus seulement rafraîchissants, ils sont également thérapeutiques.

Wooden Pigeon
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Semaine 19 : On en voit le bout !
Dernière semaine dans les vignes. Nous sommes tous éreintés, il faut dore que nous faisons des semaines de 60h et que nous arrêtons juste pour manger un très petit morceau et boire de l'eau. Plus nous serons courageux, plus nous gagnerons de quoi tenir longtemps !
Il y a encore du travail. Il faut dire que Craggy Range est un grand domaine avec ses 200 000 pieds de vignes ; probablement le plus grand domaine d'un seul tenant de la région. Murray nous raconte que le Big Boss est entrain de mettre en place un vignoble d'un million de pieds pour un américain à Blenheim sur l'île du Sud. Nous peinons à l'imaginer !
Pour arranger nos douleurs, en plus des activités de la semaine dernière, nous voilà courbés des heures entières à ras de terre en tirant sur des filets sur-tendus pour clipper le bas des filets des rangs éclaircis. Nous découvrons donc les joies des tendinites aux phalanges. Allez, c'est bientôt fini !
La semaine passe étonnamment rapidement et nous arrivons tout à coup au samedi, dernier jour (pour nous) de cette grande campagne de filetage. A la fin du mois tous ces filets seront retirés sans pitié pour les vendanges.
Quand nous partons, les superviseurs nous invitent à les recontacter quand nous remonterons sur l'île du Nord. Si il y a du travail ils nous embaucherons à coup sûr car, disent-ils, nous avons fait du très bon boulot. Les français, parait-il, travaillent souvent très bien et sont souvent de très bonne humeur. C'est marrant, c'est pas ce qu'on entend d'habitude !
Nous entamons donc nos premières journées de vacances ragaillardis. Nous ne prenons que deux jours pour nous reposer et nettoyer le van car nous trépignons d'impatience à l'idée de nous rendre enfin sur l'île du Sud.
Nous faisons nos adieux à Paul et Lisa qui nous avaient rejoints depuis deux semaines au bord de la rivière, prenons notre réservation de ferry pour le mardi matin, 8h, et quittons enfin le South Wairarapa pour Wellington.

Craggy Range Vineyard, Partie basse.
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Prendre le bateau pour l'île du Sud :